P. HÉMARDINQUER

 

LE PHONOGRAPHE ET SES MERVEILLEUX PROGRÈS

 

 

 

CHAPITRE II

 

LE PROBLÈME DE L'ENREGISTREMENT ET DE LA REPRODUCTION PHONOGRAPHIQUES

 

DEUX MERVEILLEUX PROGRÈS : L'ENREGISTREMENT ET LA REPRODUCTION ÉLECTRIQUES

 

Généralités

Les qualités des sons

Intensité des sons

Hauteur des sons

Timbre des sons

Etendue de la gamme phonographique

La solution idéale du problème phonographique

Les différents procédés d'enregistrement et de reproduction phonographiques

L'enregistrement mécanique des disques

L'enregistrement électrique et ses avantages

La reproduction mécanique

La reproduction phonographique électrique

Les perfectionnements des solutions phonographiques

 

 

 

Généralités.

 

Nous avons déjà indiqué qu'on désignait maintenant sous le nom de « phonographes » tous les appareils de principes assez divers qui servent à enregistrer et à reproduire la parole et la musique. Cependant, dans le sens vulgaire du terme, en quelque sorte, un phonographe est, avant tout, à l'heure actuelle, un appareil permettant d'enregistrer et de reproduire les sons musicaux à l'aide de disques en matière plus ou moins malléable.

Cet ouvrage est donc consacré spécialement à l'étude du phonographe à disques, et nous donnerons seulement, à la fin du volume, quelques indications sur les autres systèmes phonographiques proposés, qui sont encore plus ou moins du domaine du laboratoire.

Cependant, quel que soit le dispositif adopté, il faut d'abord bien définir les caractéristiques du problème très complexe et très délicat de l'enregistrement et de la reproduction des sons musicaux, et il convient donc de rappeler tout d'abord quelques notions élémentaires d'acoustique.

 

 

Les qualités des sons.

 

Les sons que nous percevons à l'aide de nos oreilles sont produits par des sources sonores renfermant toujours un corps matériel en vibration (corde du piano ou du violon, couches d'air du tube de l'orgue, etc.), et ils sont transmis généralement par l'air.

On distingue en physique les « sons musicaux » des « bruits », et cette détermination est assez difficile à définir simplement et avec précision,. On peut se contenter d'indiquer ici qu'un son a le caractère musical s'il produit sur notre ouïe une impression agréable, et si nous pouvons en apprécier les qualités.

On enregistre quelquefois maintenant des disques de « bruits » : bruits de la foule, de machines, de trains en marche, de la tempête, de la mer, etc., pour l'accompagnement des films sonores, mais le problème phonographique essentiel demeure toujours l'enregistrement et la reproduction des sens musicaux, et ce sont donc les seuls qu'il convient d'étudier ici.

Les sons musicaux peuvent être simples ou complexes. Les sons complexes sont les plus, fréquents ; presque tous les sons des instruments de musique sont complexes ; au contraire, les sons émis par un diapason sont simples, et peuvent être enregistrés sur un cylindre ou une bande sensible sous la forme d'une courbe périodique régulière sinusoïdale.

Un son musical complexe peut être considéré comme formé d'un son pur, que l'on appelle la note fondamentale, et d'autres sons purs de fréquence plus grande, dont le nombre de vibrations est un multiple entier de celui du son fondamental, et qu'on appelle les harmoniques.

Le piano et le violon émettent des sons très riches en harmoniques ; les cordes fines donnent souvent jusqu'au douzième harmonique de leur note dominante.

Les sons musicaux complexes peuvent être différenciés par leurs trois caractéristiques : l'intensité, la hauteur et le timbre, que nous allons étudier successivement.

 

 

Intensité des sons.

 

Les sons que nous percevons peuvent être plus ou moins intenses, c'est-à-dire produire sur notre oreille une sensation plus ou moins vive. Cette sensation dépend de la distance de la source sonore, de l'amplitude du mouvement vibratoire primitif, et de la fréquence de la note fondamentale émise.

L'intensité des sons perçus diminue proportionnellement au carré de l'éloignement de la source sonore. Si nous doublons la distance séparant un instrument de musique ou un haut-parleur de nos oreilles, nous l'entendrons quatre fois moins fort.

Ce phénomène est, d'ailleurs, fort heureux, car, si notre oreille était trop sensible, nous serions littéralement assourdis par tous les bruits environnants, et nous ne pourrions fixer notre attention sur ceux qui nous intéressent.

Il y a, d'autre part, une intensité minima au-dessous de laquelle le son n'est pas perçu. Cette limite varie d'un individu à l'autre, et généralement les deux oreilles d'un même individu ne sont même pas de sensibilité égale.

Enfin, l'énergie de l'onde sonore est proportionnelle au carré de l'amplitude de la vibration qui lui a donné naissance et à sa fréquence. A amplitude égale, les sons graves (ou de basse fréquence) seront donc beaucoup plus difficiles à enregistrer que les sons aigus (ou de fréquence élevée), et, d'ailleurs, la sensibilité de l'oreille diminue également très vite pour les sons graves.

 

 

Hauteur des sons.

 

Tous les sons peuvent être caractérisés par la fréquence du son fondamental : c'est ce qu'on appelle leur hauteur. Ainsi, la note la 6 du piano correspond à une fréquence de 870 périodes-secondes, une voix de basse descend facilement vers la fréquence 80, tandis que les voix de soprano peuvent monter jusqu'à la fréquence 900 environ.

La gamme des fréquences audibles, c'est-à-dire perceptibles par notre oreille, varie avec chaque individu sa limite inférieure est plus basse pour certains et sa limite supérieure plus haute chez d'autres, mais on peut admettre qu'elle s'étend en moyenne entre 16 et 20.000 périodes-seconde.

Nous avons fait déjà remarquer précédemment, d'autre part, que la sensibilité de l'oreille diminuait très vite pour les sons graves, comme le montrent les courbes de la figure 21.

 

 

 

FIG. 21. — I. — Courbe montrant comment varie la sensibilité de l’oreille humaine en fonction des fréquences des sons entendus (d'après Kozanowski).

II. — Limites d'audibilité maxima et minima pour une oreille normale en fonction de la fréquence et de l’intensité des sons : A, courbe de perception minima ; B, courbe au-dessus de laquelle toute sensation auditive devient pénible. (D'après Wegel.)

 

 

L'oreille est, d'ailleurs, beaucoup plus sensible aux variations de fréquence qu'aux variations d'intensité des sons ; une variation de fréquence de 0,3 % seulement serait ainsi perceptible par un individu normal.

Au-dessous de la fréquence 16 et au-dessus de la fréquence 30.000 environ, nous n'entendons plus, en général, de sons, mais nous éprouvons cependant des sensations plus ou moins vagues à proximité d'une source sonore produisant des vibrations de ce genre.

 

 

 

FIG. 22. — Fréquences des sons émis par quelques instruments de musique, et étendue de la voix humaine.

 

 

Nous pouvons évidemment sentir avec nos doigts les pulsations d'une plaque vibrant à très basse fréquence, et nous éprouvons parfois une sensation très désagréable devant un appareil émettant des ultra-sons.

La gamme des fréquences musicales correspondant aux instruments de musique actuels (1) et à la voix humaine est, d'ailleurs, beaucoup plus limitée.

 

(1) Les récents instruments de musique radio-électriques transformeront peut-être les données du problème.

 

La gamme des fréquences des notes de l'orgue descend jusqu'à 16 périodes-secondes, mais on ne peut plus considérer alors le son correspondant comme vraiment musical ; le piano produit des sons graves d'une fréquence de 27 périodes-secondes seulement, et la contrebasse peut fournir des effets analogues ; le tableau de la figure 22 montre que la limite inférieure des autres instruments de musique est plus élevée.

De l'autre côté de l'échelle des fréquences musicales, on constate que la note fondamentale la plus aiguë du piano a une fréquence de 3.480, celle de l'orgue de 4.138, celles du violon et de la petite flûte aux environs de 3.500.

L'étendue de la voix humaine semble encore plus limitée. Les voix d'hommes les plus graves, c'est-à-dire les voix de basse, ne descendent pas au-dessous de la fréquence 80, et les voix féminines de soprano les plus aiguës atteignent facilement la fréquence 900, mais rarement la fréquence 1.000.

L'échelle des fréquences musicales fondamentales s'étend donc entre 80 et 4.200 périodes-secondes, les notes plus basses n'offrant guère d'intérêt. En réalité, la gamme des sons musicaux est beaucoup plus étendue parce que nous avons indiqué qu'ils étaient rarement purs, et qu'il fallait considérer, non seulement leurs fréquences fondamentales, mais encore les harmoniques qui donnent aux sons de chaque instrument leurs timbres particuliers.

Si nous considérions seulement des sons purs, les notes aiguës seraient enregistrées sous forme de courbes resserrées, et les notes basses intenses sous forme de courbes de grande amplitude à « larges » ondulations, mais ce cas simple se présente rarement en pratique, et les sillons sonores sont beaucoup plus complexes, comme nous le verrons plus loin (fig. 23).

 

 

 

FIG. 23. — Représentation schématique de sons purs, aigus et graves en a et en b

 

 

Timbres des sons.

 

Nous distinguons des sons de même fréquence fondamentale rendus par deux instruments de musique différents ou par le même instrument actionné de diverses façons, à l'aide d'une troisième caractéristique qu'on appelle le timbre.

Le physicien allemand Helmholtz a montré, comme nous l'avons indiqué, que les timbres des sons complexes étaient dus à des harmoniques de fréquences supérieures se superposant au son pur fondamental, et il a réalisé l'analyse et la synthèse des sons musicaux, et même de la voix humaine.

 

 

 

FIG. 24. — Courbes montrant comment un son musical complexe est produit par la superposition d'une onde fondamentale et d'un harmonique de fréquence double.

 

 

Un son musical ne peut donc, en général, être représenté par des courbes du genre de celles de la figure 23, mais par une courbe plus complexe formée par la superposition d'un harmonique (fig. 24) ou même de deux ou trois harmoniques (fig. 25).

 

 

 

FIG. 25. — Analyse d'une note donnée par un violon. En a, le son résultant ; en 1, courbe du son fondamental ; en 2 et 3, harmoniques de fréquence double et triple.

 

 

Les différents sons musicaux seront donc caractérisés non seulement par leur hauteur, leur intensité, leur amortissement, etc., mais encore par le nombre des harmoniques entrant dans leur composition, la grandeur relative, la fréquence propre, et la différence de phase de ces sons composants.

Il est ainsi nécessaire d'enregistrer et de reproduire les sons fondamentaux et les harmoniques pour arriver à un résultat musical satisfaisant.

 

 

Etendue de la gamme phonographique.

 

Nous avons montré plus haut que la gamme des fréquences musicales fondamentales s'étendait environ entre 80 et 4.200 périodes-secondes, mais, pour conserver les timbres des sons musicaux, il faut ajouter au moins les premiers harmoniques des notes fondamentales, et la gamme phonographique idéale s'étendrait ainsi jusque vers 10.000 ; en fait, elle peut être réduite jusque vers 6.000 périodes sans graves inconvénients, l'audition des notes très aiguës étant fort désagréable.

Pour l'enregistrement et la reproduction de la voix humaine, cette gamme est plus que suffisante, et la limite supérieure de fréquence peut même être abaissée à 5.000 sans inconvénients graves. Il est, d'ailleurs, malgré les apparences, beaucoup plus facile d'enregistrer et de reproduire convenablement la parole que la musique, et nous avons indiqué que les premiers enregistrements phonographiques étaient des enregistrements de paroles et non de musique.

 

 

La solution idéale du problème phonographique.

 

Une machine phonographique idéale devrait permettre de reproduire tous les sons élémentaires produits par la source sonore avec leurs fréquences exactes et avec le même rapport d'intensité initiale. Si ce phonographe parfait reçoit des quantités égales d'énergie transmises par des sons purs de fréquences différentes, il doit donc, à la reproduction, retransmettre des quantités égales d'énergie pour les diverses fréquences enregistrées.

D'après ce principe, on a pu étudier scientifiquement les qualités d'un phonographe, après avoir imaginé des procédés de mesure de l'énergie sonore rayonnée.

Pour chaque note, on peut ainsi mesurer l'intensité de la reproduction phonographique, et on obtient actuellement, en réalité, une courbe dans le genre de celle représentée sur la figure 26.

 

 

 

FIG. 26. — Courbe montrant comment le phonographe moderne permet de se rapprocher de la courbe idéale de reproduction.

 

 

Si l'on réalisait une reproduction idéale sans aucune perte rigoureusement correspondante aux sons originaux, on obtiendrait une droite horizontale AB. Mais il y a évidemment une perte d'énergie, et cette perte n'est pas la même pour toutes les fréquences : le coefficient de perte est pourtant à peu près le même actuellement entre les fréquences 150 et 4.000, avec un minimum vers la fréquence 1.000.

Il est permis d'espérer que l'on pourra encore améliorer ces résultats en diminuant le coefficient de perte, en rendant encore plus uniforme cette « courbe de réponse » et surtout en abaissant au-dessous de la fréquence 100 la gamme phonographique.

Nous indiquerons, d'ailleurs, plus loin en détail les divers progrès obtenus et ceux qui restent à réaliser.

 

 

Les différents procédés d'enregistrement et de reproduction phonographiques.

 

Le seul appareil phonographique actuel d'emploi courant est le phonographe à disques ; pour l'enregistrement et la reproduction sonore de ces disques, il existe maintenant deux sortes de procédés, le système purement mécanique, et le système électro-mécanique avec emploi d'appareils radio-électriques.

Mais, alors que le procédé mécanique d'enregistrement est à peu près complètement abandonné, du moins dans l'édition phonographique, les procédés mécaniques de reproduction, d'ailleurs de plus en plus perfectionnés, sont toujours utilisés concurremment avec le procédé électrique.

Nous allons indiquer les principes de ces différents procédés, qui seront étudiés plus en détail dans la suite de ce livre.

 

 

L'enregistrement mécanique des disques.

 

Bien que le disque ait remplacé le rouleau de cire primitif, on continua à utiliser jusqu'en 1925 le procédé classique d'enregistrement basé sur le principe des premières machines parlantes de 1890.

Les ondes sonores étaient reçues dans un cornet acoustique, auquel était adapté une capsule acoustique munie d'une membrane vibrante. Cette membrane transmettait les vibrations, par l'intermédiaire d'un levier articulé, à un burin généralement en saphir traçant des sillons spiraloïdes sur un disque, ou en hélice sur un cylindre (fig. 27 et 28).

 

 

 

FIG. 27. — Principe du système ancien d'enregistrement mécanique sur disque.

 

 

 

FIG. 28. — Disposition schématique du diaphragme enregistreur et reproducteur d'un ancien phonographe à rouleaux de « cire ».

 

 

Ces sillons étaient, d'ailleurs, variables en profondeur (disques à saphir) la plupart du temps, mais on connaissait aussi, depuis l'invention de Berliner, les sillons phonographiques tracés sous forme de spirales ou d'hélices sinueuses de profondeur constante (disques à aiguille).

D'autre part, malgré l'emploi courant des disques depuis plusieurs années, certains éditeurs phonographistes ont continué longtemps à enregistrer directement sur des cylindres, et à retranscrire ensuite l'enregistrement sur disques.

Quel que soit le procédé adopté, l'énergie motrice servant à actionner le burin enregistreur était très faible, puisqu'elle était empruntée directement aux ondes sonores.

Ainsi, l'enregistrement des instruments donnant des notes de faible intensité et surtout de fréquences peu élevées était-il très difficile, et il fallait souvent adopter des artifices spéciaux de renforcement.

Les artistes, chanteurs ou acteurs, devaient être placés très près du cornet enregistreur, et l'enregistrement d'un orchestre était particulièrement délicat, puisqu'il fallait réaliser un groupement spécial des musiciens. On employait, d'ailleurs, plusieurs cornets montés en parallèle et reliés par des tubes acoustiques à l'appareil enregistreur (fig. 29).

 

 

 

FIG. 29. — Principe du procédé moderne d'enregistrement électrique.

 

 

L'enregistrement obtenu par ce procédé manquait non seulement d'intensité, mais encore de fidélité ; sans noter même les distorsions produites par le cornet acoustique, les pièces mécaniques en mouvement, membrane du diaphragme, levier articulé, burin enregistreur, par leur inertie et leurs frottements mutuels, produisaient des déformations inévitables.

On avait sans doute peu à peu amélioré ce procédé, mais les résultats obtenus ne pouvaient cependant satisfaire les vrais amateurs de musique.

 

 

L'enregistrement électrique et ses avantages.

 

Ce fut la radio-technique, nous l'avons noté dans le premier chapitre, qui permit de transformer le problème de l'enregistrement phonographique à partir de 1925, en substituant au procédé mécanique direct un système indirect électro-mécanique permettant d'amplifier les ondes sonores avant de les enregistrer.

Les ondes sonores n'agissent plus maintenant directement sur le diaphragme enregistreur en traversant un cornet acoustique, mais viennent frapper un microphone qui les transforme en courants électriques musicaux (fig. 29).

Ces courants sont transmis à un amplificateur muni de lampes de T. S. F. et, après amplification, actionnent un appareil enregistreur électro-mécanique qui grave les sillons sur un disque de cire.

On peut ainsi régler à volonté la quantité d'énergie nécessaire pour la gravure en agissant sur l'amplificateur, et on atténue la distorsion due à l'emploi des systèmes mécaniques dont il est impossible de supprimer complètement l'inertie.

Les avantages de ce procédé sont donc les suivants :

1° Plus grande pureté des sons et conservation des timbres, qui sont transmis presque intégralement au système enregistreur.

2° Disposition facile d'un ensemble musical (orchestre, etc.) autour du microphone, qui a remplacé l'ancien pavillon acoustique (fig. 31). Il devient superflu d'effectuer un groupement spécial des instruments, et les chants, discours ou les poésies, les morceaux de musique sont enregistrés tels qu'ils sont joués, prononcés, ou récités.

3° Inscription possible des sonorités dans leurs plans d'émission respectifs. Nous reviendrons plus loin sur ces effets de « perspective sonore », rendus réalisables par ce système d'enregistrement.

4° Possibilité d'enregistrer de grands ensembles musicaux, orchestres ou chœurs, dans des salles de théâtre, des cathédrales, ou même en plein air, en utilisant l'extrême sensibilité du système microphonique.

Nous montrerons dans le chapitre suivant comment on a pu utiliser pratiquement au mieux ces multiples avantages.

 

 

 

FIG. 30. — Enregistrement d’un orchestre par l’ancien procédé mécanique. Les artistes sont placés très près du cornet enregistreur et disposés suivant la nature et la force de leur instrument.

 

 

 

FIG. 31. — Enregistrement d’un orchestre par le procédé électro-mécanique. Les musiciens sont groupés normalement derrière le chef d'orchestre, sans être obligés de se rapprocher très près du microphone. Comparer avec la figure 30.

 

 

La reproduction mécanique.

 

Cependant, les disques enregistrés presque exclusivement aujourd'hui par le procédé électromécanique peuvent être reproduits de deux manières différentes, mécaniquement ou électriquement.

Le principe de la reproduction mécanique est exactement le même que celui de l'enregistrement mécanique, et il est analogue à celui appliqué sur les premiers phonographes.

Une pointe mousse en saphir, ou une aiguille en acier, suivant que les sillons sont à variations verticales ou transversales, repose sur le disque ou le cylindre enregistré et suit les sillons ; elle entre en vibration et transmet ses vibrations à la membrane d'un diaphragme reproducteur, qui, à son tour, met en mouvement la masse d'air d'un système diffuseur de sons (fig. 32).

 

 

 

FIG. 32. — Principe de la reproduction mécanique des disques de phonographe.

 

 

Ce dispositif, très a été perfectionné sans cesse, et nous étudierons au chapitre III les caractéristiques des phonographes mécaniques modernes. La transformation complète actuelle de l'industrie phonographique est, sans doute, due avant tout à la transformation des procédés d'enregistrement, mais les progrès de ces appareils reproducteurs n'en sont pas moins très marqués, car on a pu effectuer une étude rationnelle et scientifique de leurs divers organes : diaphragme, bras acoustique et cornet diffuseur de sons.

 

 

La reproduction phonographique électrique.

 

Le procédé électrique de reproduction des disques, plus complexe que le procédé mécanique, est symétrique du procédé d'enregistrement électro-mécanique.

La pointe vibrante d'un petit « traducteur » électrique ou pick-up remplaçant le diaphragme mécanique ordinaire, suit les sillons du disque enregistré (fig. 33). Les vibrations de cette pointe donnent naissance à des oscillations électriques de fréquence musicale qui sont transmises à un amplificateur à lampes de T. S. F., et actionnent enfin, après amplification, un haut-parleur analogue à ceux qui sont utilisés en radiophonie.

 

 

 

FIG. 33. — Principe de la reproduction électrique des disques de phonographe.

 

 

En faisant varier l'intensité de l'amplification radio-électrique, on peut ainsi faire varier presque à volonté l'intensité de l'audition, et obtenir une puissance comparable à celle d'un orchestre entier.

De plus, en étudiant spécialement les différentes parties du système reproducteur, il est possible d'améliorer encore la qualité de la reproduction, en introduisant, en quelque sorte, des distorsions compensatrices de celles qui sont constatées à l'enregistrement. On peut ainsi, par exemple, obtenir une excellente reproduction des fréquences basses, avantage reconnu par tous ceux qui ont entendu un phonographe électrique ou plutôt radio-électrique, c'est-à-dire un phonographe dans lequel ce système de reproduction est employé.

Comme nous l'avons noté, l'usage de la reproduction électrique n'a pas amené la suppression de la reproduction mécanique, mais elle prend un développement de plus en plus considérable, et c'est à elle que l'on doit la réalisation actuelle de la cinématographie sonore.

 

 

Les perfectionnements des solutions du problème phonographique.

 

Grâce à l'emploi du procédé d'enregistrement électrique et aux perfectionnements des dispositifs de reproduction, il est permis d'affirmer que le problème phonographique de l'enregistrement et de la reproduction des sons musicaux a été résolu d'une manière à peu près parfaite.

Sans doute, l'enregistrement mécanique avait pu être amélioré peu à peu, surtout vers 1920, mais la transformation complète des procédés phonographiques a eu lieu à partir de 1925 ; les harmoniques essentiels commencent alors à être intégralement respectés, en restituant l'atmosphère musicale presque réelle (fig. 34).

 

 

 

FIG. 34. — Graphiques montrant les progrès réalisés dans l'enregistrement de 1920 à 1927. Phonogrammes obtenus avec des appareils Columbia de 1920, 1923 et 1927, et correspondant à un vingtième de seconde de musique.

 

 

Depuis ce moment, les progrès ont continué sans cesse ; en 1925, la gamme phonographique était légèrement supérieure à quatre octaves ; en 1927, elle atteignit six octaves, et enfin sept octaves en 1929 (fig. 35).

 

 

 

 

FIG. 35. — Les progrès réalisés de 1925 à 1929. Les dimensions des cercles correspondent à l'augmentation de sonorité et les ombres indiquent les zones sonores non reproduites.

 

 

Il reste sans doute encore à abaisser légèrement la limite inférieure des fréquences enregistrées et reproduites, mais le résultat actuel, déjà vraiment prodigieux, même pour nos esprits d'hommes modernes habitués à constater toutes les applications presque miraculeuses et si diverses de la science, justifie amplement le développement inouï de l'industrie phonographique depuis quelques années.

 

 

 

 

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