Odette TURBA-RABIER

 

Odette Turba-Rabier (la Semaine Radiophonique, 05 août 1951)

 

 

Odette Marie Léone TURBA dite Odette TURBA-RABIER

 

soprano français

(129 rue de Bourgogne, Orléans, Loiret, 21 janvier 1910* – Suresnes, Hauts-de-Seine, 30 novembre 1998)

 

Fille d'André Léon Jules TURBA (Orléans, 27 juillet 1884 Fleury-les-Aubray, Loiret, 16 février 1951), employé à la Caisse d'Épargne [fils de Léon Henri TURBA (1858 – ap. 1909), décorateur et dessinateur], et de Marie Thérèse Berthe Pauline BERTRAN (Orléans, 04 décembre 1885 – Orléans, 28 octobre 1923), professeur de piano, mariés à Orléans le 19 avril 1909*.

Epouse à Orléans le 06 novembre 1933 Lucien Ernest RABIER (Orléans, 03 juillet 1906* – Paris 15e, 21 avril 1994).

 

 

Elle fit l'essentiel de sa carrière à la salle Favart.

Elle est décédée en 1998 à quatre-vingt-huit ans.

 

 

 

Sa carrière à l'Opéra-Comique

 

Elle y débuta le 11 novembre 1936 dans Lakmé (Lakmé).

 

Elle y créa le 19 juin 1937 le Bourgeois de Falaise (Rosine) de Maurice Thiriet ; le 25 juillet 1942 Ginevra (Rose embaumée) de Marcel Delannoy ; le 10 mars 1944 Fantaisie nocturne (Colombine) d'Alfred Bachelet ; le 04 juillet 1944 la Gageure imprévue (la Marquise) d'Henri Sauguet.

 

Elle y chanta Ariane à Naxos (la Naïade) ; le Barbier de Séville (Rosine) ; Carmen (Micaëla) ; les Contes d’Hoffmann (Olympia) ; l’Enfant et Sortilèges (la Princesse) ; l’Enlèvement au sérail (Blondine) ; Mignon (Philine) ; Mireille (Mireille) ; les Noces de Figaro (Chérubin) ; les Noces de Jeannette (Jeannette) ; les Pêcheurs de perles (Léïla) ; Philémon et Baucis (Baucis) ; le Roi malgré lui (Minka).

Sa carrière à l'Opéra de Paris

 

Elle y débuta le 02 mars 1945 dans Rigoletto (Gilda).

 

Elle y chanta l'Enlèvement au sérail (Blondine) en 1951.

 

 

 

 

Odette Turba-Rabier (photo Ph. Marant, 1940)

 

 

 

 

Opéra-Comique. Jeudi prochain [19 novembre 1936], pour la première soirée du grand abonnement de quinzaine (les jeudis de l’Opéra-Comique) on donnera Lakmé, avec notre célèbre ténor Georges Thill dans le rôle de Gérald qu’il chantera pour la première fois à l’Opéra-Comique ; M. A. Pernet, de l’Opéra, dans celui de Nilakantha et dans Lakmé, Mme Turba-Rabier, qui vient d’y faire des débuts très appréciés. C’est M. Eugène Bigot qui dirigera à cette occasion l’opéra-comique de Léo Delibes.

(Comœdia, dimanche 15 novembre 1936)

 

 

Création du Bourgeois de Falaise à l’Opéra-Comique.

Mme Turba-Rabier vocalise avec agilité, mais parle de manière incompréhensible et chante de façon confidentielle.

(le Ménestrel, 25 juin 1937)

 

 

Ginevra à l’Opéra-Comique.

Mme Turba-Rabier a fort joliment chanté ses vocalises avec sa voix diaphane et pure.

(Arthur Honegger, Comœdia, 01 août 1942)

 

 

 

 

 

A Orléans, il y a une vingtaine d'années, une petite fille s'ennuyait beaucoup. Sa maman était professeur au Conservatoire de cette ville et lorsqu'elle était toute petite elle regardait et écoutait chanter sa maman avec extase. A trois ans, elle chantait l'air des Bijoux, comme maman. On essayait de la faire se tromper en chemin, mais elle s'écriait, véhémente :

 

— C'est pas l’ ton !

 

Mais cette petite fille appartenait à une famille de la bourgeoisie orléanaise, et l'on avait des principes une fille de notre famille ne devient pas chanteuse. Elle ne s'engagera pas dans cette voie de perdition. Ces artistes ne sont pas des plus sérieux. Tout chez eux est fantaisie : leur vie, leurs mœurs. Et une jeune fille bien élevée n'a que faire de fréquenter ce milieu.

 

Voilà à quelles difficultés s'opposait, il y a quelques années, Odette Turba-Rabier. Car c'était elle la petite fille d'Orléans qui s'ennuyait beaucoup parce qu'elle sentait en elle une vocation artistique, et qu'elle voyait l'avenir bien sombre, sans possibilité de réaliser ses vœux.

 

Elle suivit donc sagement les cours d'un collège d'Orléans et se contenta de chanter et de jouer la comédie dans les séances récréatives de cette institution bien pensante, sous l'œil attendri et charmé de ses oncles et tantes.

 

On lui fit tout de même quelques concessions qui n'étaient pas de moindre importance dans son cas, puisqu'on lui permit de suivre les cours au Conservatoire d'Orléans. Allons ! la vie était bien agréable tout de même. Dans la classe du maître Antoine Mariotte, elle obtint son premier prix au Conservatoire d'Orléans.

 

***

 

Immédiatement, elle eut envie de rallier Paris. Ce qui était bien légitime. Mais c'est là que les difficultés naquirent. La famille n'appréciait pas du tout ces goûts d'indépendance. Quelle fille damnée ! Que lui prenait-il ? Ainsi donc, il faudrait avoir dans la famille une artiste !

 

Malgré les réprobations de sa famille, Odette partit pour Paris. A la fin de sa première année d'études, elle obtint son premier prix de chant au Conservatoire de Paris.

 

Très gentiment, elle voulait bien faire aussi des concessions à sa famille. Elle ferait donc une carrière de concertiste et de professeur. Voilà des vues bien raisonnables et très classiques, propres à rassurer oncles, tantes et cousins orléanais, et à se faire absoudre. Elle ne ferait pas de théâtre et acceptait sans trop de mal ce renoncement.

 

Mais dès sa sortie du Conservatoire, l'Opéra et l'Opéra-Comique l'engageaient. Elle fut tour à tour Rosine, puis Lakmé, joua à l'Opéra : Rigoletto, les Pêcheurs de Perles, le Roi malgré lui, les Contes d'Hoffmann, Wagner, tout Mozart, etc... En même temps, elle chantait chez Pasdeloup, Lamoureux... et à la radio. Puis vinrent les tournées en représentations officielles ou non dans toutes les villes de France, en Belgique, Anvers, Bruxelles, en Suisse, en Angleterre, en Afrique du Nord, en Italie.

 

***

 

Le 14 juin dernier, elle représenta le chant français en participant au festival qu'organise la Grande-Bretagne à l'occasion de l'Exposition internationale. Au cours d'une des manifestations artistiques consacrées à la France, Odette Turba-Rabier interpréta l'Enfant et les Sortilèges, de Ravel.

 

***

 

Odette Turba-Rabier a un frère, musicien comme elle, mais passionné pour le jazz. Et elle a aussi un mari, et un petit garçon et une petite fille de douze et quatorze ans. Sa grande fierté est de pouvoir concilier sa vie artistique et sa vie familiale, et ses yeux brillent d'orgueil lorsqu'elle parle de ses deux enfants.

 

— Un jour, raconte-t-elle, Jean est rentré du lycée très ému. Il y avait livré une violente bagarre, et lorsque je m'enquis de la raison de ce duel : « Y a un camarade au lycée qui m'a dit : Ah ! ta mère, c'est une chanteuse ! Alors je m' suis battu ! Hein, maman, que j'ai bien fait ? » Et je lui ai répondre : « Oui, elle est chanteuse ! Et puis c'est même une des plus grandes du moment. N'est-ce pas que c'est vrai ? »

 

Bien sûr que c'est vrai ! et le petit Jean avait bien raison de combattre une fois de plus ce préjugé qui, décidément, semble poursuivre Mme Turba-Rabier jusque dans ce sage lycée de garçons.

 

Mais Odette Turba-Rabier me rassure. Cette famille qui avait été si longtemps hostile à l'idée d'une carrière artistique a accueilli à bras ouverts l'enfant prodigue lorsqu'elle revint à Orléans couverte de gloire et de lauriers, et elle est devenue maintenant l'enfant chérie de la maison.

 

***

 

Pour les fêtes de Jeanne d'Arc, Odette ira chanter à Orléans. Puis elle pensera aux vacances qu'elle passera avec son mari, sa fille et son petit garçon, en montagne, dans un coin paisible des Pyrénées.

 

— Pour être tranquille et goûter en paix la douceur familiale, dit-elle. Je ferai de la marche à pied et de la voiture, avec mon mari et les enfants.

 

Là, elle fuira la foule des admirateurs, les snobs qu'elle n'aime pas du tout.

 

— Je préfère, assure-t-elle, les spectateurs des deuxièmes et troisièmes balcons, des galeries, qui font des économies pour venir vous voir et vous offrent parfois un ou deux œillets ou quelques violettes.

 

Elle est très sensible à ces marques d'admiration-là.

 

***

 

Et comme elle évoque tout à coup le cadre de son travail, et qu'elle ne peut s'empêcher de parler de ses enfants, elle me rappelle encore cette jolie anecdote :

 

La première fois qu'on emmena son fils et sa fille à l'Opéra-Comique pour applaudir leur mère, on donnait Lakmé. Le papa du coin de l'œil épiait les réactions des deux bambins, et lorsque Lakmé se jeta dans les bras de Gérald, la petite fille, inquiète, se tourna vers son papa et lui dit :

 

— Papa ! C'est notre maman à nous ? bien à nous ? n'est-ce pas ?

 

Et lorsqu'à la fin de la représentation, la salle entière applaudit à tout rompre, et rappela, rappela encore, de grosses larmes coulaient sur les joues de la petite fille qui dit encore à son papa :

 

— Oh ! tu sais ! je ne pleure pas de chagrin, mais « tout ça », c'est pour notre maman !

 

(Stéphane Epin, la Semaine Radiophonique, 05 août 1951)

 

 

 

 

Discographie

 

N° catalogue N° matrice Date d'enregistr. Compositeur Œuvre  Extrait Interprètes Accompagnement

 COLUMBIA

LFX 674 CLX 2412 09/10/1942 STRAUSS (Richard) ARIANE à NAXOS Air de Zerbinette (1) Odette TURBA-RABIER Orchestre dir. Jean FOURNET
LFX 674 CLX 2413 09/10/1942 STRAUSS (Richard) ARIANE à NAXOS Air de Zerbinette (2) Odette TURBA-RABIER Orchestre dir. Jean FOURNET

 PATHÉ

PDT 8025 CPTX 776 23/02/1948 BACH (Johann Sebastian) MAGNIFICAT "Quia respexit" Odette TURBA-RABIER Mr FRANçOIS (hautbois d'amour) & Orchestre Symphonique dir. Jean GITTON

 LA VOIX DE SON MAÎTRE

DA 5029 OLA 5650 14/11/1949 THOMAS (Ambroise) MIGNON "Je suis Titania" (1) Odette TURBA-RABIER Orchestre dir. Albert WOLFF
DA 5029 OLA 5651 14/11/1949 THOMAS (Ambroise) MIGNON "Je suis Titania" (2) Odette TURBA-RABIER Orchestre dir. Albert WOLFF

 L'OISEAU-LYRE

OL 143 Partx 3074   MONTECLAIR JEPHTé Air d'Iphise Odette TURBA-RABIER Ensemble orchestral de l'Oiseau-Lyre dir. Roger DéSORMIèRE

 

 

 

 

    

 

"Quia respexit"

extrait du Magnificat de Jean-Sébastien Bach

Odette Turba-Rabier, Mr François (hautbois d'amour) et Orchestre Symphonique dir Jean Gitton

Pathé PDT 8025, mat. CPTX 776, enr. au Théâtre des Champs-Elysées le 23 février 1948

 

 

 

 

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